Val – 31 mars 2015

 

Le deuxième thème c’était « je roule ».  Bon alors ca c’est plutôt rigolo. Je vous fais une petite mise en contexte avant de rentrer dans le vif du sujet. La raison pour laquelle je vous ai lâchement abandonnés pendant un mois c’est que mon dos m’a lâchement abandonnée aussi et que, comme de bien entendu, cela a généré un effet domino. Après 4 semaines de médecins, d’IRMs, de scanners, d’osteod’une telle quantité de médicaments que je me fais livrer directement par camion tous les samedis avec mes courses Auchande « Madame nous devons vous opérer d’urgence », « Madame, vous opérer serait prendre un risque démesuré» etc… Madame a craqué, a traité tous les médecins, chirurgiens, neurochirurgiens, neurologues, orthopédistes et j’en passe de vétérinaires mal dégrossis et a choisi de gérer le problème toute seule en s’installant dans un fauteuil roulant. 

Assez cool le fauteuil ! Noir, léger, pliable (il rentre même dans ma Smart), plutôt chic, un rayon de braquage inégalé, démontable et supportant un poids qui dépasse largement les spécifications constructeur. Cela a donné lieu à quelques craquements et grincements les premiers jours mais maintenant la mamamobile se comporte avec dignité et courage devant cette adversité.

Bon, néanmoins, ce n’est pas le fauteuil roulant de Johnny English qui me fait rêver depuis que j’ai vu le film. Déjà ilmanque tout bêtement des poches pour mettre des objetsindispensables comme mes clés, mon badge, mes pièces pour la machine à caféla bombe lacrymogène anti boiteux, mon poudrier, mes médicaments, les trucs de base quoi. Mais, plus encore, j’apprécierai beaucoup un petit moteur pour les montées (et les moments d’extrême lassitude), un espace réfrigéré pour le Champagne, des hauts parleurs et un écranpour pouvoir regarder un bon film pendant les trajets, une sirène qui se déclenche automatiquement à l’approche du boiteux ou de son aréopage, un système élévateur parce que j’en ai marre de parler au nombril de mes interlocuteurs (déjà je me trouvais petite mais là  c’est juste ridicule), et un bouton ZZZZZ qui met la chaise en mode lit avec coussin et couette. Des petits chaussons et une liseuse seraient aussi les bienvenusLe tout pliable, pesant moins de 15kgs, et coutant moins de 500€.  

J’ai découvert plusieurs choses dans cette nouvelle vie à roulettes. La première c’est que de pousser une chaise roulante c’est CREVANT. J’ai fait plus de gym en une semaine que dans les 10 dernières années cumuléesMais je ne développe ni mes abdos (dont je soupçonne qu’ils ont disparu depuis longtemps en laissant une annonce pour louer le site sur « seloger.fr »), ni mes cuisses, non, je développe mes biceps…  J’ai 50 ans, je suis quelque peu enrobée et dans un fauteuilroulant, je pense qu’augmenter visiblement ma testostérone avec des bras de camionneurs suant sang et eau à chaque fois que je dois gravir une rampe devrait largement contribuer à l’augmentation de mon sex appeal

La deuxième c’est que quand on est dans un fauteil roulant tout le monde est sympa. Ils n’osent pas demander pourquoi on y est ce qui est dommage parce que j’ai une liste de réponses adaptées : saut en parachute, parapente, formule 1, cours de ski avec Grospiron, femme canon… Non, ils compatissent. Et, franchement, la compassion, c’est très sous estimé. Ca fait vraiment du bien quand tous les gens qu’on croise baissent la tête (forcément puisque je rase la moquette), prennent un air affligé et disent, avec toute l’empathie dont ils sont capables : « et toi, ca va, tu tiens le coup » ? Ben mine de rien, ca me fait du bien. D’autant qu’il y en a qui m’aident en poussant la mamamobile. D’ailleurs, honnêtement, j’en abuse. Dès qu’on arrive près d’une rampe à monter, je prends mon look 36bis qui est un croisé entre Droopy et un Calimero dépressif qui ferait fondre Angela Merkel et presque à tous les coups (sauf si je suis entourée de traders mais là c’est sans espoir), il y a quelqu’un pour me proposer de me pousser en haut de la rampe. C’est d’autant mieux que comme mes freins ne marchent que d’un coté, quand mes bras lâchent en milieu de montée, ce qui arrive assez souvent, la redescente en marche arrière tournante se termine en collector sur YouTube

Le troisième, c’est que les parkings et les immeubles qui se disent compatibles « PMR » (personnes à mobilité réduite) sont des menteurs invétérés. Mon chemin du matin pour aller du parking à mon bureau : porte de parking qui s’ouvreuniquement à coups de pieds (quoiqu’un de ces jours je vais arriver avec une torche pour résoudre définitivement le problème, comme disait la grande Jacqueline Maillan « quand on est énervé ca soulage »), entrée de l’immeuble en tourniquet (il faut donc appeler la sécurité pour passer par l’issue de secours), SAS où il faut tenir les deux portes ouvertes en meme temps pour passer (allo, je ne m’appelle passhiva), l’ascenseur handicapé ouvert entre 9h et 16h (c’est quand même un concept intéressant de savoir que dans un immeuble qui se gargarise de sa PMR comptabilité, si on est handicapé on ne peut travailler que dans une plage horaire limitée) et enfin bureaux moquetés parce que c’est vrai, un sol carrelé légèrement glisssant ca ne serait pas suffisamment challengeant

Le quatrième c’est que dans certaines circonstances il est difficile de conserver sa dignité. Et la circonstance à laquelle je fais référence en particulier c’est le remontage de la mamamobile en arrivant dans le parking le matin. Je suis bien sûr en robe, collants noirs, sac Vuitton et châle en cashmere, on sait vivre, même en roulettes.  Comme il est impossible de la remonter debout, je m’installe avec autant de dignité que je peux en préserver parterre entre l’huile de vidange et les traces de frein  pour remonter les roues et les repose-pieds. Les roues, après quelques coups de talons, ca passe, mais les repose-pieds je les monte systématiquement à l’envers et  comme je n’ai pas la force de les démonter et de les remonter,  j’ai pris le parti de rouler avec les jambes en X. Ca donne l’impression que j’ai un maintien très élégant

Pour finir, quelques constats. Tout d’abord, comme pour les voitures, quand on enlève le frein à mains, ca roule beaucoup mieux. Même si je n’en n’ai qu’un qui marche, quand il est bloqué, j’ai tendance à tourner en rond un bon moment avant de comprendre qu’il y a comme une erreur.    

Deuxièmement, comme l’a tristement découvert Isadora Duncan, les châles, quand il y a des roues à proximité, ce n’est pas une bonne idée. Et une fois qu’ils sont bloqués dans la roue (ou même les deux) la marche arrière façon moonwalk pour essayer de récupérer le châle en un morceau ca tient des finales intervilles.

 

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